Les restructurations ne sont pas des accidents ponctuels, mais un processus récurrent face auquel les salariés apparaissent inégaux et peu préparés.
Crise oblige, les restructurations sont revenues sur le devant de la scène. Et de manière spectaculaire. Depuis début mars, les annonces de fermetures d'usines ou de plans sociaux se multiplient, avec pour corollaire une radicalisation des conflits: séquestration de dirigeants chez Caterpillar, 3M, Faurecia, Sony, Heuliez, Scapa, Molex; dégradation de locaux par les salariés de Continental; blocage des trois usines françaises du groupe Manitowoc... Rarement la colère sociale n'aura autant fait la une des médias. La rapide montée du chômage entraînée par la crise a en effet replacé les restructurations au coeur de l'actualité. C'est ainsi qu'au seul mois de mars dernier, l'administration a recensé 223 plans de sauvegarde de l'emploi - on ne dit plus "plans de licenciement collectif pour raison économique" -, deux fois plus qu'en septembre 2008. Par ailleurs, les inscriptions à Pôle emploi suite à un licenciement économique ont explosé: + 46,1% en mars 2009 par rapport à mars 2008.
Cette envolée des plans sociaux, pour spectaculaire qu'elle soit, ne traduit pas une réelle rupture avec les tendances antérieures: "Depuis une dizaine d'années, la restructuration est de moins en moins un phénomène rythmé, c'est-à-dire un traumatisme ponctuel. Elle devient de plus en plus un phénomène permanent, voire une méthode de gestion bien intégrée par le management de certaines entreprises, à l'image de Solectron, une société spécialisée dans l'assemblage électronique pour le compte de grands groupes électroniques, dont elle a parfois repris les usines, et qui a réalisé huit plans sociaux en cinq ans", explique Martin Richer, directeur général de Secafi, un cabinet d'expertise au service des comités d'entreprise. Après une baisse dans la seconde moitié des années 1990, le nombre de plans de sauvegarde de l'emploi est en effet resté à un niveau considérable: près de 1 200 par an en moyenne entre 2001 et 2008.
Les années 1970 et 1980 avaient déjà été marquées par des restructurations sectorielles lourdes, menées conjointement par les entreprises et l'Etat, notamment dans la sidérurgie ou les chantiers navals. Avec le développement de la mondialisation, on est entré au cours des dernières décennies dans un régime de restructuration continue, lié à une recherche systématique de rentabilité à court terme pour répondre aux exigences d'un capitalisme actionnarial multipliant les fusions-acquisitions suivies de cessions à des Leveraged Buy Out, les LBO (*) , etc. Des évolutions qui se sont traduites par une recomposition permanente des processus de production.
Inégaux face aux licenciements
Avec la crise, ce mode de régulation qui fait reposer l'ajustement sur les salariés est plus critiqué que jamais, notamment en raison de son court-termisme. En attendant son éventuelle remise en cause, c'est au code du travail de tenter de limiter les conséquences so-ciales de cette instabilité permanente. La législation encadrant les licenciements collectifs est relativement stricte. Elle se traduit par une obligation d'informer et de consulter le comité d'entreprise et certaines obligations sociales (voir encadré). Mais, dans la pratique, seuls 10% à 20% des salariés touchés par un licenciement économique bénéficient d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
Qu'en pensez vous ?